Je ne dors plus.
Je bois, je m’agite, je cogne sur des sacs qui ne rendent pas les coups. Et malgré tout ça, je reste lucide. Trop lucide, peut-être. Ces notes, je les écris pour pas perdre le fil. Parce que quand la famille se disloque et que la ville s’écroule sur elle-même, y a plus que l’encre pour te dire que t’es encore debout.
4 juillet – Disparition
Marie. Ma petite sœur. Pas rentrée depuis deux jours.
Elle n’a jamais été la plus forte, ni la plus libre. Mais elle a toujours été droite. Et là, c’est le vide. Alors je réunis tout le monde. On cherche. Parce que c’est ce qu’on fait quand on tient encore un peu aux nôtres.
Sur le chemin, ça dérape vite :
Two J et Vincenzo tombent sur le parrain Marsalla, moi sur O’Callaghan, celui qui tient la mafia irlandaise. Il veut stocker ses armes dans l’épicerie. Ce qu’il me reste de mon père, de ma mère. J’hésite pas à lui faire comprendre que le deal sera pas aussi simple.
Dans l’arrière-boutique, un flic infiltré traîne. Il veut changer de camp. Il me fatigue, mais je lui donne une chance. Il m’avoue avoir vu Marie partir avec Tom. Mon propre frère. Le même que je traîne en cure depuis des mois.
Fouille, poudre, et vieilles histoires
La chambre de Marie nous donne quelques pistes : lettres d’hommes, un rendez-vous. On remonte.
Tom. On fouille sa chambre. Un demi-kilo de poudre vaudou. La saloperie jusqu’au plafond. Je serre les dents. Encore une fois.
Hans, pendant ce temps, reçoit des nouvelles d’un vieil ami de son père. Un revenant, là aussi. Rien ne reste mort bien longtemps dans cette foutue ville.
Chute lente
On poursuit la piste de Marie jusqu’à La Pomme d’Ève. Elle y a été vue, shootée, avec un type : Abraham. Un nom que Two J connaît — la salle de boxe. Une piste.
Puis Moe nous appelle. Maxwell est en vrac, depuis que Misty l’a quitté. Moe est sincère. Et on ne ment pas : on promet d’aider. On le pense vraiment. On a toujours une place pour les causes perdues.
La nuit, chacun se perd
Two J dîne avec Milly et Tom Moore. Il accepte de les suivre en politique, pour Milly. Il est suivi. Buenaventura. Silencieux comme une dette.
Chez Vincenzo, c’est encore pire. Une quarantaine de personnes en pleine messe tordue. Armes, munitions, vêtements blancs. La folie de sa femme gagne du terrain. On chope les munitions et on file.
L’hôtel, la vidéo, l’incendie
Retour à la Pomme d’Ève. Deux jeunes Noirs craquent sous la pression. Ils nous conduisent à un hôtel miteux.
Un vieux réceptionniste poisseux. Des chambres avec miroirs sans tain, des caméras. Marie y a été.
La vidéo ? Seuls Hans et Vincenzo la regardent. Je ne l’ai pas vue. Mais j’ai vu leurs visages. Et c’était assez.
Ils mettent le feu à l’hôtel. Moi, je les laisse faire.
Misty, Palmer, et une mise en orbite
On passe voir Misty. Son hôtel. Une Lincoln garée devant : celle du maire Palmer.
On s’approche, ça pue l’opération de charme. Pamela est là, avec un collègue. Ils tendent le piège.
À l’étage, Vincenzo et Hans frappent. Palmer ouvre, le sourire au coin des lèvres. Quand il sort, il rameute deux flics. Et là, je perds patience. Je lui balance un coup de pied dans les bijoux de famille. Mérité.
Misty ? Elle nous congédie. Elle croit au conte de fées : Palmer va quitter sa femme pour elle. Maxwell ? Oublié. Elle le dit avec un calme qui me donne froid.
5 juillet – Les pièces tombent
Hans trouve une menace sous sa porte. Puis le père de Miss Evans est retrouvé mort. Hans est suspecté. Et Miss Evans ? Elle le glace.
On se retrouve au bureau. Hans est à bout. Il dit les mots qu’on pensait tous. On se divise pour avancer.
Moi, je pars avec Two J. On suit un rêve qu’il a eu, un de ceux qui vous collent au crâne.
On tombe sur Léo Bruiseur, dans une chambre d’hôtel. Suicidé, la bouche ouverte comme une injonction. Sa fille hurle. Je l’emmène. Two J, lui, reste. Le rêve était vrai.
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Je ne sais plus si je dors ou si je me réveille au milieu d’un cauchemar qui dure.
Chaque jour ressemble à la veille, en pire. Et même quand on pense avoir touché le fond, y a toujours un foutu étage en dessous.
Des rêves et des fantômes
Léo Bruiser s’est collé une balle. Sa fille était là, trop jeune pour ce genre de scènes.
J’ai veillé sur elle jusqu’à l’arrivée de Malcom et Hobbs — deux vrais flics, des survivants d’un temps révolu. Ils ont calmé les mômes arrogants qui l’accompagnaient. J’ai raccompagné la gamine. Elle m’a dit qu’une femme lui était apparue en rêve. Qu’elle lui avait dit d’aller chez son père. Une femme qui ressemblait à Lily. Le fantôme de la ferme. Le même qui m’avait conduit au cadavre de Milly Collins. Ces morts-là ne nous quittent jamais.
À la maison de Léo, notre ancien capitaine, devenu chef de la police, nous attend. Bras en écharpe, mais encore debout. Il nous dit que Léo avait peur. Qu’il pensait que "ça avait recommencé". Qu’un tueur reprenait son œuvre. Il avait raison.
Mise à mort(s)
2J a retrouvé les deux types responsables du viol de Marie. Ils nous supplient de les tuer. La mort leur vaudrait peut-être le pardon.
Moi, j’ai envie de les castrer. Qu’ils vivent avec ça. Qu’ils chient du sang et se souviennent de Marie à chaque douleur.
2J s’y oppose. Il dit que soit on les laisse, soit on les bute.
On s’engueule. Mais je suis fatigué. Las de crier, las de convaincre. Je les laisse partir. Ils ne méritent même plus ma haine. Juste l’oubli.
La chute finale
On rentre. Hobbs et Malcolm nous attendent à l’agence.
Marie a été retrouvée. Pas vivante.
Je n’ai pas besoin de l’entendre. Je reconnais les regards, les postures, le silence pesant.
Milly m’effondre dans ses bras. Mon père fixe le vide. Ma mère n’est même plus là, ailleurs dans sa tête.
Le corps ? Découpé. Reconstitué. Une question gravée dans sa chair : “Est-ce que tu m’aimes ?”
Je n’ai pas pleuré. J’ai juste senti quelque chose se briser. Quelque chose d’irréparable.
Hans a parlé à Tom. Un seul mot. Un seul poing. C’est plus que ce que je lui aurais donné.
Je suis monté dans la chambre. Il flottait entre deux mondes, la cervelle fondue par sa propre came.
Je ne lui ai rien crié. Je lui ai juste dit qu’il devait disparaître. Il n’était plus mon frère. Il n’était plus rien.
Les jours d’après
On s’est endormis dans le bureau de l’épicerie. Aucun de nous n’a dit un mot.
Le lendemain matin, Tom s’est suicidé.
Un autre cadavre. Un autre cercueil. Un autre poids.
À peine le temps de le pleurer qu’on apprend que Misty, retrouvée en morceaux dans un parc, est la nouvelle victime.
Quelqu’un a payé une diversion pour poser le corps. On nous parle d’un jeune en Bentley métallisée. Moins un indice qu’un crachat sur notre impuissance.
Le chef de la police se fait tirer dessus. Par la colocataire de Léo. Et pire encore : sa propre fille.
On retrouve son journal. Encore Lily. Encore elle. Elle a dicté une liste de cibles. Nous sommes sur cette liste.
Comme tous ceux qui ont voulu protéger Léo, ou simplement survivre à cette ville.
Sang, cris, et rafales
Vandecamp, le rédac' chef du Hush Hush, veut nous payer pour nous faire parler sur Palmer. On le balance. Pas question de jouer les témoins pour ce vautour.
Et puis tout s’emballe : tensions raciales dans les quartiers, un cadavre égorgé dans une bagnole rose.
On file au Hush Hush. Émeute. Fuite. Hurlements.
Dans le bureau : Vandecamp en panique.
La fille de Léo le tient en joug. La prostituée est à ses côtés. Mais elle… elle n’est plus humaine.
Peau tendue. Ventre gonflé. Voix dans nos têtes. Quelque chose hurle à l’intérieur d’elle.
Vincenzo tacle la fille. Nous, on vide nos chargeurs sur la prostituée.
Elle encaisse. Puis elle crie : “Pourquoi ?” avant de crever.
Toujours ce mot. Pourquoi. Comme un refrain qu’on ne comprend plus.
Enterrements
Double enterrement chez les MacAllister.
Tom. Marie. Deux pierres. Deux trous. Des pleurs en sourdine.
J’ai passé un pacte avec la mafia irlandaise. Ma famille sera protégée. Je suis à eux maintenant.
Flic ou criminel ? Honnêtement, je ne vois plus la différence.
Tout le monde est là. Mafias, anciens collègues, quelques politiques. Même Moore. Même Milly.
À côté, Léo, dans une fosse commune. Un suicidé n’a pas droit aux prières. Juste à l’oubli.
Hans et Vincenzo s’éclipsent pour y assister. Ils voient la femme. Encore elle.
Elle leur murmure : “Pourquoi l’avez-vous laissé mourir ?”
Personne n’a de réponse. On ne sauve plus personne ici.
Dernier cavalier
On retrouve Maxwell. Une loque.
Alcool. Héroïne. Délire. Il nous prend pour les cavaliers de l’apocalypse. Peut-être qu’il a raison.
Il exige qu’on retrouve le tueur de Misty. Il ne demande pas. Il ordonne.
Je n’ai même pas la force de lui dire non. On accepte.
Une prostituée grimée en Misty nous croise à la sortie. C’est ça, maintenant. De l’imitation, pour survivre.
Moe nous parle de la famille Sanders. Des gens riches. Trop riches pour être propres.
Ils aiment les Bentley grises.
Peut-être une piste.
Ou peut-être juste un autre mirage dans le désert.
Conclusion ?
Je n’en ai pas.
Je ne crois plus au sens. Ni à la justice. Seulement aux balles bien placées, et aux rares visages que je peux encore regarder sans haine.
J’ai perdu un frère.
J’ai perdu une sœur.
Et j’ai l’impression qu’on a tous perdu la guerre sans s’en rendre compte.
Maintenant, je veux juste trouver le tueur.
Et le détruire.
Lentement.