Houses of the blooded : retour de lecture
Publié : ven. févr. 25, 2011 10:30 am
Parlons aujourd’hui d’un jeu qui a été évoqué ça et là sur ce forum, mais pas vraiment chroniqué : Houses of the blooded.
Il s’agit d’un jeu paru en 2008, écrit par John Wick, à qui l’on doit L5R, 7th sea, et dont le contesté livre de conseils de jdr « dirty MJ » a été traduit dans la langue de Molière il y a peu de temps.
J’en vois déjà qui salivent. Ne vous emballez pas, les gars : les récents jeux de M. Wick n’ont pas grand-chose à voir avec leurs illustres prédécesseurs. Wick a découvert le système FATE, l’a arrangé à sa sauce et a sombré dans le style narratif/participatif.
Disons-le tout de suite, afin qu’il n’y ait pas de malentendu là-dessus : je ne suis pas fan du système Fate et des jeux de troisième génération (participatifs et à traits libres), parce qu’ils ne correspondent pas, habituellement, à ce que je recherche dans le jdr.
Mais de même qu’un amateur de bon vin peut préférer le bordeaux et savoir apprécier de temps en temps un bon bourgogne (ou inversement), j’aime le jdr en général, et donc j'ai eu la curiosité de décortiquer le machin. Mais revenons-en à Houses of the Blooded.
I. Présentation du BG :
Une civilisation mystérieuse
HotB s’inspire d’une civilisation mythique, les Ven, qu’il situe « quand les civilisations Atlantes et Hyperboréennes étaient encore jeunes ». On nous dit qu’il en est brièvement question dans quelques très vieux bouquins moisis, mais je ne suis pas allé vérifier si c’était vrai, et franchement, on s’en tape un peu le coquillard, puisqu’apparemment on ne sait quasiment rien d’eux : l’auteur a largement extrapolé à partir de ce qu’il avait sous la main, et il nous encourage à faire de même.
Les Ven vivaient donc sur un monde qu’ils appelaient « Shanri », et s’ils ressemblaient beaucoup à des humains, ils n’en étaient pas pour autant. Ils avaient des couleurs de peau allant du brun rouge au brun foncé, des teintes de cheveux semblables aux nôtres (encore que le blond soit beaucoup plus rare) et des yeux aux couleurs parfois très exotique (genre rouge ou jaune). La grossesse d’une femme Ven ne durait qu’une saison, et les gens de ce peuple « vivaient » environ un siècle. La maladie était une chose inconnue chez eux, et ils ne mourraient jamais de vieillesse. Mais en prenant de l’âge, ils devenaient plus grands, plus fins, plus fragiles. Puis, vers cent ans, ils se mettaient à exsuder un liquide blanchâtre qui formait comme un cocon autour d’eux et ils sombraient dans un sommeil sans fin, devenant ainsi des Suavens, des créatures aux désirs énigmatiques avec lesquelles on n’entre en contact que par le rêve.
Ainsi, ni le temps ni la maladie ne pouvaient tuer les Vens. Mais ils n’étaient pas immortels pour autant. Les accidents, les meurtres et autres morts violentes n’étaient pas rares, et suscitaient une tristesse infinie : être privé du sommeil des Suaven pour entrer dans le néant de la mort, la fin de toute chose, leur semblait tout simplement insupportable.
Du sang dans les Vens
Sur le monde de Shanri il n’existait que deux types de créatures : les Vens et les Orks. Le mot « ork » désignait en fait tout ce qui n’était pas Ven, et les Orks étaient monstrueux, au propre comme au figuré.
A l’origine, les Vens n’étaient que les serviteurs de puissants roi-mages, mais ceux-ci s’étaient livré à une guerre fratricide à outrance, et aucun d’entre eux n’y avait survécu. Cette guerre avait fait de Shanri une terre brûlée et peuplée de monstres, et les Vans avaient eu bien du mal à la rendre à nouveau vivable. Aussi s’étaient-ils regroupés en familles, puis en lignées de sang, puis en maisons. Les plus nobles d’entre eux étaient les « Blooded », car ils avaient bénéficié d’un rituel de sang qui les rendait plus puissants. Les autres, les « unblooded », étaient considérés comme des esclaves dépourvus de droits, des objets, en quelque sorte. Ils acceptaient cet état de fait comme une chose naturelle.
Chaque Ven appartenait donc à une des six maisons existantes, et chacune de ces six maisons prisait une vertu plus que les autres. Chacune de ces maisons avait également un totem animal.
Ainsi, l’isolationniste et rude maison de l’Ours prisait la force. La raffinée et prévoyante maison du Cerf vénérait l’intelligence. L’exotique et vagabonde maison du Faucon mettait en avant le courage. L’intrigante et artistique maison du Renard appréciait avant tout la beauté. La mystique et mystérieuse maison du Serpent croyait en la sagesse. Et la vaillante et bouillonnante maison du Loup révérait la prouesse martiale.
[Ici, tous les gens qui connaissent un peu L5R lèvent l’oreille : les maisons rappellent forcement un peu les clans. L’Ours ressemble à un mix dragon/crabe, le Cerf pourrait être la grue, le renard s’appeler le scorpion, le serpent fait penser au phoénix et le loup au lion…
En fait, on s’imagine vite jouer à L5R avec le système de HotB, possibilité qui deviendra encore plus évidente avec le supplément/complément Blood & Honor, qui utilise les mêmes règles pour jouer des samuraïs. On y reviendra dans une chronique future. Néanmoins, pour ce qui est d’HotB, la société Ven ne ressemble pas vraiment à la culture Rokugani.]
Chacune des maisons s’organisait selon une structure pyramidale d’inspiration féodale, commune à toutes. A la tête de chaque maison se trouvait un duc. Celui-ci régnait sur des marquis, qui régnaient sur des comtes, qui régnaient sur des barons, qui régnaient sur des chevaliers, qui régnaient sur les paysans.
Il n’y avait pas vraiment de prêtres chez les Ven, car la seule chose qui pouvait ressembler à une religion résidait dans la prière aux Suavens, qui depuis leur sommeil guidaient parfois les éveillés. Certes, certains Suavens étaient révérés par plus de monde, et leurs adorateurs formaient des cultes plus ou moins secrets, mais tout ceci était une question de foi et n’avait rien d’officiel.
L’ensemble des nobles formaient le sénat, où la valeur du vote de chacun était indexée selon le nombre de territoires qu’il possédait. La plupart des décisions importantes étaient donc prises collégialement. Jadis, les Ven avaient eu un empereur, mais le dernier en date, 200 ans auparavant, avait sombré dans la folie en manipulant imprudemment le savoir magique des anciens roi-sorciers. Il avait fallu la coalition de toutes les maisons pour venir à bout de son règne maléfique, et sa maison d’origine, celle du Cerf, porta à jamais la honte de cette faute.
Depuis, un consensus tacite s’était fait : il n’y aurait plus jamais d’empereur, les plus puissants des Vens seraient les six ducs des six maisons.
Ce qui est à moi m’appartient
Lorsqu’un Ven voulait une chose, il se contentait de la prendre. Si cette chose appartenait à quelqu’un, il y avait deux cas de figure : soit cette personne la lui cédait, soit elle essayait de la conserver.
La loi du plus fort prévalait : si un Ven ne parvenait pas à conserver ses biens, c’est qu’il n’était pas digne de les conserver. Cette règle valait tout aussi bien pour une tasse en terre cuite que pour un cheval ou un château.
Néanmoins, afin d’éviter que tout cela ne dégénère en un bain de sang généralisé, il existait les duels. Ceux-ci n’étaient permis qu’à partir du moment où un conseil composé de six membres des six maisons l’autorisait. Ces duels allaient rarement jusqu’à la mort, et pouvaient être autorisés également dans les cas où un Ven estimait qu’il avait été offensé par un autre. Et comme depuis la chute du dernier empereur plus aucun noble n’était autorisé à entretenir une armée, les conflits territoriaux se soldaient généralement par un duel entre deux seigneurs.
Pourtant, ceux qui ne se satisfaisaient pas du caractère aléatoire d’un duel usaient volontiers de l’assassinat, et l’usage du poison était populaire : il est plus facile de prendre quelque chose dont le propriétaire est mort. Bien sûr, le meurtre était illégal, mais encore fallait-il découvrir le coupable et prouver sa culpabilité.
La vengeance est vôtre
Il n’existait pas de mot Ven pour désigner la justice, mais il en existait un pour désigner la vengeance. Ce même mot, prononcé légèrement différemment, signifiait également « passion ».
Certes, les Ven avaient quelques lois fondamentales (six, en fait) et le fait d'enfreindre ouvertement l'une d'entre elles pouvait obliger un Ven à "porter le noir". Durant cette période, le Ven renonçait à l'usufruit de ses terres et se trouvait socialement ostracisé.
Mais pour tous les cas où l'identité du coupable n'était pas clairement définie, et ne pouvait donc donner lieu ni à un duel, ni à une condamnation à porter le noir, il restait la vengeance.
Le Sénat avait loisir d’autoriser un Ven à exercer son droit de vengeance durant une période définie. Le Ven se vêtait alors de rouge et, durant cette période, était autorisé à rechercher et à tenter de tuer le coupable, ainsi que tous ceux qui voudraient s’interposer entre lui et sa vengeance. Une fois la vengeance accomplie ou le temps écoulé, l’affaire était close. Définitivement.
Et les PJ dans tout ça ?
Les PJ sont de jeunes barons. Ils doivent survivre aux intrigues des PNJ et parfois des autres PJ, voire intriguer eux-même pour accroître leur pouvoir si ça les amuse. On louche clairement plus vers une ambiance à la trône de fer que vers une ambiance à la Seigneur des anneaux. Et la partie des règles qui concerne la gestion des fiefs rappelle des jeux comme Birthright ou encore Pendragon.
Etrangetés en vrac
Comme nous l’avons dit plus haut, les Ven ne peuvent entretenir d’armées. Cependant, ils sont autorisés à avoir une « garde personnelle » afin de protéger leurs biens et eux-mêmes. A ces unités limitées en taille s’ajoutent des armées secrètes, dissimulées dans les provinces et déguisées en paysans.
Les Ven privilégient également l’amour courtois, et leurs histoires de cœur s’étalent souvent sur de longues années, au terme d’un parcours amoureux extrêmement codifié, que n’auraient pas reniées les cours d’amour Arthuriennes.
Et puis il y a les Orks. Ces bêtes aux pouvoirs étranges qui errent un peu partout.
Et les reliques des roi-sorciers, leurs anciens artefacts et les rituels qui s’y rattachent, formant ensemble un savoir interdit et dangereux, à la fois si tentant et si corrupteur…
Bon, je ne vais pas expliquer ici toutes les subtilités et les contradictions de la culture Ven, mais elle est riche, complexe, et offre largement de quoi dépayser les joueurs tout en leur donnant du grain à moudre.
Conclusion du BG
Les amateurs d’action débridée ne trouveront probablement pas ici le terrain de jeu idéal : certes, les opportunités de combat sont nombreuses, mais le BG sent l’intrigue d’alcôves, les complots, les alliances, les trahisons, les chantages, les passions les plus exaltées ou les plus noires de l’âme humaine, la tragédie.
C’est un jeu de politique. Et c’est, je le pressens, un de ces jeux qui plaira beaucoup aux filles, ce qui n’est pas si courant dans le jdr.
Mais c’est aussi un BG bien vide. J’entends par là que si beaucoup de choses nous sont dites sur les us et coutumes des Ven, sur leurs valeurs morales, leur mode de vie et leur conception de l’existence, on ne saura par contre rien des lieux qu’ils habitent ni des gens qui les dirigent : il n’y a même pas de carte du monde fournie.
Un peu comme dans le jeu Sengoku, où on vous explique tout des mœurs du Japon féodal sans pour autant vous donner un cadre géopolitique et historique précis, vous saurez qui sont les ven et comment ils vivent… mais pas plus.
Cela tient à une raison intrinsèquement liée au système de jeu choisi. En effet, chaque table aura une vision du monde de Shanri extrêmement différente des autres… car c’est un monde que vous allez fabriquer avec vos joueurs. Et quand je dis « avec », ce n’est pas qu’une image. Les joueurs y apporteront autant de choses que le MJ, et sans doute même plus !
[à suivre avec la partie II : le système]
Il s’agit d’un jeu paru en 2008, écrit par John Wick, à qui l’on doit L5R, 7th sea, et dont le contesté livre de conseils de jdr « dirty MJ » a été traduit dans la langue de Molière il y a peu de temps.
J’en vois déjà qui salivent. Ne vous emballez pas, les gars : les récents jeux de M. Wick n’ont pas grand-chose à voir avec leurs illustres prédécesseurs. Wick a découvert le système FATE, l’a arrangé à sa sauce et a sombré dans le style narratif/participatif.
Disons-le tout de suite, afin qu’il n’y ait pas de malentendu là-dessus : je ne suis pas fan du système Fate et des jeux de troisième génération (participatifs et à traits libres), parce qu’ils ne correspondent pas, habituellement, à ce que je recherche dans le jdr.
Mais de même qu’un amateur de bon vin peut préférer le bordeaux et savoir apprécier de temps en temps un bon bourgogne (ou inversement), j’aime le jdr en général, et donc j'ai eu la curiosité de décortiquer le machin. Mais revenons-en à Houses of the Blooded.
I. Présentation du BG :
Une civilisation mystérieuse
HotB s’inspire d’une civilisation mythique, les Ven, qu’il situe « quand les civilisations Atlantes et Hyperboréennes étaient encore jeunes ». On nous dit qu’il en est brièvement question dans quelques très vieux bouquins moisis, mais je ne suis pas allé vérifier si c’était vrai, et franchement, on s’en tape un peu le coquillard, puisqu’apparemment on ne sait quasiment rien d’eux : l’auteur a largement extrapolé à partir de ce qu’il avait sous la main, et il nous encourage à faire de même.
Les Ven vivaient donc sur un monde qu’ils appelaient « Shanri », et s’ils ressemblaient beaucoup à des humains, ils n’en étaient pas pour autant. Ils avaient des couleurs de peau allant du brun rouge au brun foncé, des teintes de cheveux semblables aux nôtres (encore que le blond soit beaucoup plus rare) et des yeux aux couleurs parfois très exotique (genre rouge ou jaune). La grossesse d’une femme Ven ne durait qu’une saison, et les gens de ce peuple « vivaient » environ un siècle. La maladie était une chose inconnue chez eux, et ils ne mourraient jamais de vieillesse. Mais en prenant de l’âge, ils devenaient plus grands, plus fins, plus fragiles. Puis, vers cent ans, ils se mettaient à exsuder un liquide blanchâtre qui formait comme un cocon autour d’eux et ils sombraient dans un sommeil sans fin, devenant ainsi des Suavens, des créatures aux désirs énigmatiques avec lesquelles on n’entre en contact que par le rêve.
Ainsi, ni le temps ni la maladie ne pouvaient tuer les Vens. Mais ils n’étaient pas immortels pour autant. Les accidents, les meurtres et autres morts violentes n’étaient pas rares, et suscitaient une tristesse infinie : être privé du sommeil des Suaven pour entrer dans le néant de la mort, la fin de toute chose, leur semblait tout simplement insupportable.
Du sang dans les Vens
Sur le monde de Shanri il n’existait que deux types de créatures : les Vens et les Orks. Le mot « ork » désignait en fait tout ce qui n’était pas Ven, et les Orks étaient monstrueux, au propre comme au figuré.
A l’origine, les Vens n’étaient que les serviteurs de puissants roi-mages, mais ceux-ci s’étaient livré à une guerre fratricide à outrance, et aucun d’entre eux n’y avait survécu. Cette guerre avait fait de Shanri une terre brûlée et peuplée de monstres, et les Vans avaient eu bien du mal à la rendre à nouveau vivable. Aussi s’étaient-ils regroupés en familles, puis en lignées de sang, puis en maisons. Les plus nobles d’entre eux étaient les « Blooded », car ils avaient bénéficié d’un rituel de sang qui les rendait plus puissants. Les autres, les « unblooded », étaient considérés comme des esclaves dépourvus de droits, des objets, en quelque sorte. Ils acceptaient cet état de fait comme une chose naturelle.
Chaque Ven appartenait donc à une des six maisons existantes, et chacune de ces six maisons prisait une vertu plus que les autres. Chacune de ces maisons avait également un totem animal.
Ainsi, l’isolationniste et rude maison de l’Ours prisait la force. La raffinée et prévoyante maison du Cerf vénérait l’intelligence. L’exotique et vagabonde maison du Faucon mettait en avant le courage. L’intrigante et artistique maison du Renard appréciait avant tout la beauté. La mystique et mystérieuse maison du Serpent croyait en la sagesse. Et la vaillante et bouillonnante maison du Loup révérait la prouesse martiale.
[Ici, tous les gens qui connaissent un peu L5R lèvent l’oreille : les maisons rappellent forcement un peu les clans. L’Ours ressemble à un mix dragon/crabe, le Cerf pourrait être la grue, le renard s’appeler le scorpion, le serpent fait penser au phoénix et le loup au lion…
En fait, on s’imagine vite jouer à L5R avec le système de HotB, possibilité qui deviendra encore plus évidente avec le supplément/complément Blood & Honor, qui utilise les mêmes règles pour jouer des samuraïs. On y reviendra dans une chronique future. Néanmoins, pour ce qui est d’HotB, la société Ven ne ressemble pas vraiment à la culture Rokugani.]
Chacune des maisons s’organisait selon une structure pyramidale d’inspiration féodale, commune à toutes. A la tête de chaque maison se trouvait un duc. Celui-ci régnait sur des marquis, qui régnaient sur des comtes, qui régnaient sur des barons, qui régnaient sur des chevaliers, qui régnaient sur les paysans.
Il n’y avait pas vraiment de prêtres chez les Ven, car la seule chose qui pouvait ressembler à une religion résidait dans la prière aux Suavens, qui depuis leur sommeil guidaient parfois les éveillés. Certes, certains Suavens étaient révérés par plus de monde, et leurs adorateurs formaient des cultes plus ou moins secrets, mais tout ceci était une question de foi et n’avait rien d’officiel.
L’ensemble des nobles formaient le sénat, où la valeur du vote de chacun était indexée selon le nombre de territoires qu’il possédait. La plupart des décisions importantes étaient donc prises collégialement. Jadis, les Ven avaient eu un empereur, mais le dernier en date, 200 ans auparavant, avait sombré dans la folie en manipulant imprudemment le savoir magique des anciens roi-sorciers. Il avait fallu la coalition de toutes les maisons pour venir à bout de son règne maléfique, et sa maison d’origine, celle du Cerf, porta à jamais la honte de cette faute.
Depuis, un consensus tacite s’était fait : il n’y aurait plus jamais d’empereur, les plus puissants des Vens seraient les six ducs des six maisons.
Ce qui est à moi m’appartient
Lorsqu’un Ven voulait une chose, il se contentait de la prendre. Si cette chose appartenait à quelqu’un, il y avait deux cas de figure : soit cette personne la lui cédait, soit elle essayait de la conserver.
La loi du plus fort prévalait : si un Ven ne parvenait pas à conserver ses biens, c’est qu’il n’était pas digne de les conserver. Cette règle valait tout aussi bien pour une tasse en terre cuite que pour un cheval ou un château.
Néanmoins, afin d’éviter que tout cela ne dégénère en un bain de sang généralisé, il existait les duels. Ceux-ci n’étaient permis qu’à partir du moment où un conseil composé de six membres des six maisons l’autorisait. Ces duels allaient rarement jusqu’à la mort, et pouvaient être autorisés également dans les cas où un Ven estimait qu’il avait été offensé par un autre. Et comme depuis la chute du dernier empereur plus aucun noble n’était autorisé à entretenir une armée, les conflits territoriaux se soldaient généralement par un duel entre deux seigneurs.
Pourtant, ceux qui ne se satisfaisaient pas du caractère aléatoire d’un duel usaient volontiers de l’assassinat, et l’usage du poison était populaire : il est plus facile de prendre quelque chose dont le propriétaire est mort. Bien sûr, le meurtre était illégal, mais encore fallait-il découvrir le coupable et prouver sa culpabilité.
La vengeance est vôtre
Il n’existait pas de mot Ven pour désigner la justice, mais il en existait un pour désigner la vengeance. Ce même mot, prononcé légèrement différemment, signifiait également « passion ».
Certes, les Ven avaient quelques lois fondamentales (six, en fait) et le fait d'enfreindre ouvertement l'une d'entre elles pouvait obliger un Ven à "porter le noir". Durant cette période, le Ven renonçait à l'usufruit de ses terres et se trouvait socialement ostracisé.
Mais pour tous les cas où l'identité du coupable n'était pas clairement définie, et ne pouvait donc donner lieu ni à un duel, ni à une condamnation à porter le noir, il restait la vengeance.
Le Sénat avait loisir d’autoriser un Ven à exercer son droit de vengeance durant une période définie. Le Ven se vêtait alors de rouge et, durant cette période, était autorisé à rechercher et à tenter de tuer le coupable, ainsi que tous ceux qui voudraient s’interposer entre lui et sa vengeance. Une fois la vengeance accomplie ou le temps écoulé, l’affaire était close. Définitivement.
Et les PJ dans tout ça ?
Les PJ sont de jeunes barons. Ils doivent survivre aux intrigues des PNJ et parfois des autres PJ, voire intriguer eux-même pour accroître leur pouvoir si ça les amuse. On louche clairement plus vers une ambiance à la trône de fer que vers une ambiance à la Seigneur des anneaux. Et la partie des règles qui concerne la gestion des fiefs rappelle des jeux comme Birthright ou encore Pendragon.
Etrangetés en vrac
Comme nous l’avons dit plus haut, les Ven ne peuvent entretenir d’armées. Cependant, ils sont autorisés à avoir une « garde personnelle » afin de protéger leurs biens et eux-mêmes. A ces unités limitées en taille s’ajoutent des armées secrètes, dissimulées dans les provinces et déguisées en paysans.
Les Ven privilégient également l’amour courtois, et leurs histoires de cœur s’étalent souvent sur de longues années, au terme d’un parcours amoureux extrêmement codifié, que n’auraient pas reniées les cours d’amour Arthuriennes.
Et puis il y a les Orks. Ces bêtes aux pouvoirs étranges qui errent un peu partout.
Et les reliques des roi-sorciers, leurs anciens artefacts et les rituels qui s’y rattachent, formant ensemble un savoir interdit et dangereux, à la fois si tentant et si corrupteur…
Bon, je ne vais pas expliquer ici toutes les subtilités et les contradictions de la culture Ven, mais elle est riche, complexe, et offre largement de quoi dépayser les joueurs tout en leur donnant du grain à moudre.
Conclusion du BG
Les amateurs d’action débridée ne trouveront probablement pas ici le terrain de jeu idéal : certes, les opportunités de combat sont nombreuses, mais le BG sent l’intrigue d’alcôves, les complots, les alliances, les trahisons, les chantages, les passions les plus exaltées ou les plus noires de l’âme humaine, la tragédie.
C’est un jeu de politique. Et c’est, je le pressens, un de ces jeux qui plaira beaucoup aux filles, ce qui n’est pas si courant dans le jdr.
Mais c’est aussi un BG bien vide. J’entends par là que si beaucoup de choses nous sont dites sur les us et coutumes des Ven, sur leurs valeurs morales, leur mode de vie et leur conception de l’existence, on ne saura par contre rien des lieux qu’ils habitent ni des gens qui les dirigent : il n’y a même pas de carte du monde fournie.
Un peu comme dans le jeu Sengoku, où on vous explique tout des mœurs du Japon féodal sans pour autant vous donner un cadre géopolitique et historique précis, vous saurez qui sont les ven et comment ils vivent… mais pas plus.
Cela tient à une raison intrinsèquement liée au système de jeu choisi. En effet, chaque table aura une vision du monde de Shanri extrêmement différente des autres… car c’est un monde que vous allez fabriquer avec vos joueurs. Et quand je dis « avec », ce n’est pas qu’une image. Les joueurs y apporteront autant de choses que le MJ, et sans doute même plus !
[à suivre avec la partie II : le système]