[CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Critiques de Jeu, Comptes rendus et retour d'expérience
Botot
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[CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Botot »

Bonjour à tous

Voici le début des CRs d'une campagne en Laelith basée sur les règles de Simulacres. Dans le style, enfin j'espère, de "gagner la guerre" de Jaworski, sans bien évidemment prétendre égaler le maitre. Et avec énorme dédicace à l'équipe avec qui laquelle on joue, notamment notre MJ aussi cruel qu'imaginatif sur les échecs comme les réussites critiques.

Acte 1 : On a marché sur des oeufs

Acte 1, scène 1: des passagers de qualité

Bonjour ami lecteur. Je partage ici le récit de mes aventures. Enfin, si jamais on retrouve ces mémoires, car à l'intérieur résident quelques secrets qu'il serait bien malavisé de dévoiler. Des personnages importants en seraient ulcérés, et leur indisposition risquerait de nuire à ma belle composition.

Je me présente, Burak Biriçik, pour vous servir. Et aujourd'hui, ça y est, c'est le premier jour de ma nouvelle vie, après quelques longs mois de transition entre mes première et deuxième existences. Je suis avec mes deux camarades sur une grande barque, en route vers les Pontons.

Enfin mes deux camarades, tout est relatif, compagnons d'infortune serait probablement plus adéquat. Lugan est un barde qui semble connaître son art, mais il reste un roturier sans le sou. D'ailleurs, Lugan, est-ce un nom de scène ou son patronyme de naissance? Vu qu'il ne s'est présenté que sous ce seul prénom, cela reste un mystère, mais je le lui laisse bien volontiers.

Quant à Alceste Chien-Noir, il a le physique de l'emploi, et cet emploi n'est basé ni sur la finesse ni sur la tendresse ni d’ailleurs sur quoique ce soit qui aurait pu permettre une complicité entre lui et moi lors de ma première vie. Je pense qu'entre l'immense hache à deux mains et l'énorme molosse noir qui le suit partout, tout est dit. Cependant, vu ce qu'on doit faire, il pourrait être utile, enfin si ça tourne mal.

Car sur le papier, la mission que nous a confiée Maître Marckmell est des plus simples. Nous allons à une vente aux enchères et le lot que nous devons acquérir est le plus prestigieux de la vente, trois œufs de griffon. Pour cela, nous avons un mandat au porteur de 300 pièces d'or. Et tout ce que nous ne dépensons pas pour acquérir ce lot, nous pourrons le garder pour nous. Qu'est ce qui pourrait mal se passer ?

Bon. Déjà, je suis devenu prudent, voire méfiant. Il y a un an seulement, j'étais l'une des pièces les plus importantes de la noble famille Biriçik, dans le grand jeu de pouvoir qui se déroule à la cour du calife de Caphernabad, la plus grande et belle des huit villes du Sultanat Sardakim. Malgré mon jeune âge, tout me prédisait une belle carrière : mon entregent distingué, la qualité de ma conversation, mon sens du commerce et même ma science du fleuret. Malheureusement, une funeste pièce de théâtre, dont je vous reparlerai plus tard, a déclenché une crise de paranoïa aiguë chez le calife. La fine fleur de l'aristocratie du califat a été emprisonnée ou exécutée. Et je n'ai dû mon salut qu'à la fuite, ayant mis de côté ma fierté pour me déguiser en colporteur, sans nouvelle des autres membres de ma famille, et n'ayant que fort peu d'espoir quant à leur sort. D'étoile montante du califat, je suis devenu un aristocrate en fuite.

Bref, revenons à cette mission, si facile sur le papier. Le principal sujet, c'est le lieu des enchères, les Pontons, un des nombreux quartiers de Laelith. Enfin, un quartier, pas tout à fait. C'est plutôt un territoire de non droit arrimé à l'immensité qu'est la ville de Laelith. Une enclave gérée d'une main de fer par Bernys, négociateur de génie qui a obtenu d'en faire une zone extraterritoriale où les lois du Roi-Dieu ne s'appliquent plus. Il est devenu le patron de ce faubourg, et ce sont ses règles qu'on y applique, de manière extrêmement brutale s’il le faut. Pas étonnant que pour vendre des objets aussi précieux et dangereux que des œufs de griffon, cela se passe ici-bas.

D'ailleurs, le public de cette barque est à l'avenant. Pour commencer, nous avons deux jeunes nobliaux en quête d'amusement et de sensations fortes, visiblement bien décidés à s'encanailler. D'ailleurs, ils ont déjà commencé, puisqu'ils enchaînent bruyamment des calembours de mauvais goût au sujet de cette femme qui est avec nous sur le bateau. C'est vrai qu'elle ne ressemble à rien, mais je lui trouve le regard haineux, et ça pourrait bien mal finir.

Et puis il y a ces deux encapuchonnés, un jeune sacrément musclé et aimable comme une porte de prison, et un vieux à l'air malicieux. Ils ressemblent à des prêtres, mais je ne connais pas assez Laelith pour savoir ce qu'ils viendraient faire dans ce lieu de perdition. Avec le nautonier qui pilote la barque de manière assurée, et la fine équipe que nous formons avec Alceste et Lugan, voilà un attelage bien bigarré pour naviguer vers les Pontons. Je prédis que la faune locale sera exotique. Parole d'expert car, ma modestie devant en souffrir, je dois vous avouer que je suis un amateur plus qu'éclairé en zoologie.

Et voilà, ce qui devait arriver arriva. La femme entre deux âges vient de se jeter sur les deux inconscients, le couteau à la main et la bave au coin des lèvres. Et la barque commence à osciller dangereusement. Mon camarade barde ne trouve rien de mieux pour détendre la situation que d'entonner une chansonnette particulièrement vulgaire dédiée à cette hystérique. (Note de jeu, échec critique sur le jet de séduction). Si on voit le verre à moitié plein, ça marche, puisqu'elle en oublie les deux aristocrates. Mais côté verre à moitié vide, elle se jette sur lui, la lame en avant. Si nous voulons sauver notre ami et éviter que notre frêle embarcation ne chavire, il va falloir se mouiller. Je tente un de mes plus beaux compliments, mais elle m'ignore superbement, la rustre. Et voilà, la barque commence à tanguer de plus en plus fort. 

Mais d'un coup, notre pragmatique Alceste, sans mot dire, positionne sa musculature à l'endroit parfait pour stabiliser le navire. Il remonte dans mon estime le bougre. Certes, il a l'avantage de la masse, mais tout de même, c'était fait avec une belle précision.Et s'il est perdu pour l'art de la conversation, il semblerait qu'il en ait plus entre les deux oreilles que ce que j'avais jugé au premier abord. En tout cas, cela semble calmer la mégère qui remballe aussi sec son matériel, tout en lançant des regards noirs aux deux gentilshommes et à notre camarade Lugan. Elle aussi cachait bien son jeu, car je sens bien qu’elle n’en est pas à son coup d’essai avec le surin. Le voyage continue dans le calme, enfin soyons précis, dans un silence de mort.

Nous arrivons enfin à destination, et en quelques mouvements adroits, le pilote de notre esquif arrime la barque. Nous descendons. Je retente mon plus beau sourire vers cette femme, mais c'est évident, elle me méprise. Ce qui est certes un moindre mal par rapport à mon ami le ménestrel, qu'elle hait désormais avec une telle force que si son regard pouvait tuer, il serait d’hors et déjà six pieds sous terre. Il a bien raison de la laisser passer devant lors de la descente du navire.

Une fois à terre, les deux aristocrates viennent nous remercier, et en profitent pour se présenter: Raimbaud de Gesvres et Edelsterand D'Anglures. Pour que vous puissiez apprécier cette rencontre à sa juste valeur, il me paraît important de vous préciser que, en toute humilité, j'ai l'une des plus belles cultures générale de tout feu la haute société de Caphernabad. Couplé à ma connaissance intime des us et coutumes de la noblesse, je suis donc au fait de la plupart des lignées de notre continent. Edelsterand est de petite noblesse et connu pour quelques rimes. Mais Raimbaud ! C'est un des mignons du Roi-Dieu. Et nous venons de lui sauver la vie. 

Mon destin à Laelith vient de s'éclairer en lettres incandescentes. Huit lettres pour être précis. R.A.I.M.B.A.U.D. Je cache le fait que je l'ai reconnu, mais je fais feu de tout bois à l’aide de mon admirable talent conversationnel, et nous convenons de nous retrouver durant leur séjour pour partager nos aventures autour d'une bonne bière. Il semble que les deux nobles passagers aient apprécié notre compagnie, au-delà de ce trivial détail, celui de leur avoir épargné une fin aussi mesquine que définitive. Le destin est en marche ! (note de jeu, En vérité, Raimbaud n'est qu'un nobliau de seconde zone. Tout vient d'un échec critique sur le jet de culture générale).

Nous nous séparons, et je devise avec mes compagnons, enfin surtout avec Lugan, Alceste restant toujours aussi taciturne. Je partage mes informations et le barde semble ravi de cette rencontre, même s'il semble moins enthousiaste que moi. Et je comprends vite pourquoi. Il m'informe qu'il a reconnu la drôlesse. Jana Vise-l'oeil. Une tueuse plus que réputée à Laelith. Mon camarade va devoir marcher dos au mur désormais, au moins sur les Pontons. Mais à mon humble avis, il ferait mieux d'apprendre à ne dormir que d'un œil le temps que tout cela se tasse. Finir sur le pavé avec un poignard dans le dos fait désormais partie des futurs probables du ménestrel, et pas besoin de don de voyance pour le prédire.

Un pêcheur se met à commenter la détonante compagnie descendue de la barque, mais dans un patois tellement vulgaire que je n'y entends goutte. Et là encore, Alceste me surprend. Il a compris ce qui a été dit. Notons-le, il a un vrai potentiel, rustique mais bien pratique. Le pêcheur parle de poissons d'argent et de crâne. Et là, tout s'éclaire. Je connais bien sûr les différents clergés de Laelith, mais la connaissance restait théorique. Maintenant, nous en sommes aux travaux pratiques. Le vieil enfroqué est en fait un curé du poisson d'argent, spécialiste en matière fiscale, probablement venu pour prendre une taxe sur les transactions qui auront lieu dans la salle des enchères. Car on le sait bien, l'extraterritorialité s'arrête là où la fiscalité commence. Et la jeune armoire à glace est un prêtre du crâne, la police secrète du Roi-Dieu. Probablement une inspection de routine à côté de son collègue. Aucun de mes compagnons n'avait encore proposé d'action "cavalière" pour obtenir les œufs, je pense que désormais nul n'osera ne serait-ce que verbaliser cette idée (note de jeu, cela malgré les encouragements de notre fourbe MJ, qui ne cesse de nous y inciter).

L'après-midi se passe rapidement. Nous trouvons un lieu de repos que son propriétaire appelle auberge, et dont je m’accommode, habitué depuis quelques mois à vivre dans un confort plus que spartiate. Nous prenons des informations, en discutant avec la faune de notre gargote et en nous baladant autour du lieu de la vente aux enchères. Le lieu des transactions sera une trirème démâtée, arrimée en bord de quai après un ultime voyage. Il y aura une vente aux enchères avec de nombreux lots, mais le prix le plus prestigieux sera bien évidemment les œufs de griffon.

Le maître de cérémonie sera Serhafa, à l'évocateur surnom de Cerfa qui fleure bon la rigidité et le respect de la procédure (note de jeu, ce surnom vient d'une erreur de prononciation). Il nous vient du Cloaque, cet immense espace sous la ville de Laelith où rôdent moult créatures, toutes plus dangereuses les unes que les autres. Plus précisément, il est une des figures du Grand Marché, lieu où se font et se défont les transactions des bas-fonds. Détail pittoresque, les créatures qui habitent dans le sous-sol peuvent venir elle aussi commercer. Et plus d'un marchand du Cloaque a trépassé sous les coups de massue d'un troll, mécontent de ses emplettes ou plus simplement affamé. Mais revenons à Cerfa, il est autant connu pour ses capacités de commissaire priseur que pour sa discrétion et son intégrité. Des qualités rares surtout dans le "milieu" de la pègre locale, qui lui valent donc cette position aujourd'hui.

"Fluctuat nec mergitur", "comme nous le dirions entre savants. "Il est battu par les flots mais ne coule pas" si je devais traduire cette sentence à Alceste. Je trouve que cette expression s'applique parfaitement à la situation. Tant au navire où se tiendront les enchères qu'à notre mission. Car finalement tout devrait être aussi simple qu'il le semblait au départ, malgré les péripéties sur la barque. Que pourrait-il nous arriver d'affreux maintenant ?
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par kyleighterry »

Votre histoire est tellement intéressante
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Cuchurv
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Cuchurv »

Ça me donnerait envie de faire pareil mais du côté de mon personnage @Botot.

Signé : le troubadour qui a un nom de famille, mais que le nobliau snobinard n'a pas noté. :grmbl: :mrgreen:
 
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Cryoban »

Laelith et le Cerfa du Cloaque...je kiffe :yes:
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par nonolimitus »

Botot a écrit : mar. sept. 24, 2024 10:46 pm Que pourrait-il nous arriver d'affreux maintenant ?

me voilà bien hameçonné maintenant... ;)

La suite ! La suite ! La SUITE !
Le DIEU avec du gobelin dedans !!!

« Vivre, ce n'est pas sérieux ce n'est pas grave, c'est juste une aventure, presque un jeu... »
Jacques Brel
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Harfang2 »

Laelith + Simulacres. Une bonne combo pour que je suive.
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Botot
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Botot »

Merci à tous pour vos retours qui donnent envie de partager. Il se trouve que j'ai encore quelques épisodes sous le coude, comme le sait d'ailleurs le troubadour à qui je réponds ici, face au clash qu'il propose. Réponse A, B ou C
* A: dois-je t'apprendre le principe de la licence poétique, cher ami des arts lyriques ?
* B: mais oui viens poster ta life, on va voir qui pèse dans le game 
* C: si tu avais répondu le jour même quand je t'ai posé la question, alors que tu bronzais négligemment en Sicile, peut-être n'aurais du pas user de ce ressort narratif, qui s'est in fine révélé merveilleusement adéquat et qui a conduit ma joyeuse ignorance de tes réponses ultérieures


Acte 1, scène 2: des enchères si pépères

Quand sonnent les coups de sept heures, nous montons à bord, et il y a déjà une foule bigarrée dans la pièce principale de cette trirème, devenue salle d'enchère improvisée. Cela donne à cette vente un cachet ma foi fort pittoresque. Les cinq voyageurs qui étaient avec nous sur la barque ce matin sont tous là: nos deux nobles amis Raimbaud et Edelsterand, Jana Vise-l'oeil la nouvelle némésis de Lugan, et les deux prêtres. La joueuse de surin n'était donc pas là par hasard sur cette barque. Elle a probablement un mandat, un personnage de sa trempe ne jouant pas pour des enchères de seconde zone. De plus, elle est à couteaux tirés avec Lugan. Nous devrons la garder à l'œil, avant qu’elle ne nous vise. 

Mais au-delà de nos compagnons de barque, il y a des invités de marque. Tout d’abord est présent Valentin Pauvre-mage. Il nous vient de la tour de l'échec, l'un des quatre pics montagneux hébergeant les établissements de sorcellerie de la ville et de loin le moins prestigieux. Les mages qui en sont issus sont généralement assez faibles, voire en situation d'échec, ceci expliquant donc cela. De plus il dégage un fort fumet, en rapport avec sa faible propension à prendre des bains. Il ne paie décidément pas de mine. Mais tout de même, c’est un mage, et peut être qu'avec des œufs de griffon, il pourrait réussir quelque rare enchantement qui lui permettrait de changer de statut voire de tour. Peu probable mais à surveiller.

Nous avons ensuite Zorbec le Gras, connu autant pour sa stature dans le "milieu" que par sa capacité à ne jamais être associé à quoique ce soit de louche, par les autorités locales tout du moins. Est-il là pour faire des emplettes ou pour préparer quelque coup d'éclat ? Puis, nous avons Maulévrier, fameux collecteur de dettes, cherche-t-il des créanciers ou à dépenser la recette de ses derniers recouvrements musclés? Enfin, nous avons Rodrigue d'Ardellonde, militaire de carrière et garde du corps de l'ambassadeur de Burgonnie, immense royaume du bout du monde. En sus de cette noble et moins noble assemblée, il y a moult vigiles et autres gros bras musclés. Je ne rentrerai pas dans leur détail mais définitivement cette vente fait l'objet de beaucoup d'attention, tant par ses participants prestigieux que par la protection associée.

Nous avons un plan pour cette vente aux enchères. Lugan et Alceste vont rester discrets et surveilleront la pièce, pendant que ma modeste personne prendra toute la lumière, bien évidemment dans l'intérêt supérieur de la mission. La session commence par la présentation des différents lots soumis aux enchères. En sus des œufs de griffon, deux objets attirent notre attention. Il y a un candélabre aux symboles du Crâne, dont l’offrande pourrait apporter quelque indulgence auprès de la police du Roi-Dieu. Il y a également un antique secrétaire de plus de deux siècles, qui semble de fort bonne facture. Après la présentation d'une dizaine de lots, nous avons quelques temps avant que la vente ne commence. J’en profite pour papillonner dans la salle, nouer des contacts, et plus généralement être vu, conformément à mon interprétation du plan, forcément personnelle.

Pendant que je déambule, mon camarade barde m’informe discrètement que ce meuble plus de deux fois centenaire serait de grande valeur, et je m’empresse de partager cette information à mon ami Raimbaud. Il me remercie chaleureusement et m’assure vouloir suivre mes conseils, car il a toute confiance en moi. Encore une occasion pour raffermir nos liens ! Fort de ce bel échange, je tente ma chance avec Rodrigue. C’est un noble d’un puissant pays, et son amitié pourrait m’aider dans ma quête de statut social.

Je m’approche donc et commence à converser, en faisant preuve de ma finesse légendaire. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que cela ne se passe pas exactement comme prévu. On ne saura pas si c'est la différence de culture ou l'absence de référence militaire, mais mes brillants traits d'esprit ratent un à un leur cible. Heureusement que les enchères démarrent, car lui comme moi sommes assez gênés par le ridicule de la situation. Bien sûr je pourrais me trouver des excuses, car je ne connais pas tous les us et coutumes de Laelith. Mais je dois faire attention et travailler pour que ça ne se reproduise pas, sinon mon destin pourrait me filer entre les doigts.

Bref, la vente a commencé, et je me reprends. Je dois me concentrer car je vais devoir mener la danse quand commenceront les choses sérieuses. Les enchères se succèdent, et les différents lots sont progressivement alloués aux différents adjudicateurs. Quand arrive le tour du secrétaire, Raimbaud suit visiblement mon conseil avec une belle énergie, et finit par l’acquérir pour quarante pièces d’or. Un bon prix pour un très bel objet. Nous gagnons encore des points auprès de lui ! A titre de curiosité, le chandelier à l'effigie du crâne est gagné par Maulévrier. Vu le commerce particulier qu’il exerce, c’est une opération de relation publique rondement menée qui se déroule devant nos yeux.

Enfin, c’est le moment tant attendu, le clou de ce grand spectacle qu’est une vente au enchères : le dernier lot ! Les œufs sont mis à prix soixante pièces d’or. Jana-Vise-L’œil est bien là pour eux, car elle lance la première enchère. Je lève la main à mon tour et je lui décoche mon plus beau sourire. A part un léger haussement d'épaule, rien ne se passe, elle me prend vraiment pour un moins que rien. Même si c'est un brin mesquin pour un être de ma condition, je vais lui prouver le contraire, car je n'ai pas l'intention d'être battu par une roturière!

Mais du coin de l’œil, je vois Alceste qui commence à s’agiter. Il semble avoir repéré deux individus suspects dans cette salle. Nous les prenions pour de simples gardes du corps, mais ils semblent particulièrement stressés. Alceste s’approche d’eux tout en retenue, avec une délicatesse qu’on ne lui aurait pas prêtée. J'essaie de comprendre ce qu'il a vu d’étrange et soudain, tout s'éclaire ! Bon sang, mais c’est bien sûr ! C'est Valentin Pauvre-Mage qui est le commanditaire de ces deux personnages, et visiblement il est en train de préparer un coup fumant.

Les enchères continuent. Je les perds de vue car je sais que tout se joue autour de l'apprenti-sorcier. Valentin fait semblant de ne pas voir que je l'épie, mais j'ai tout compris, je vois clair dans son jeu ! Tout à ma surveillance du mage, j'en oublie d’enchérir et c’est mon camarade Lugan qui prend le relais, comme convenu. Enfin presque comme convenu. En effet, il devait prendre la suite pour des considérations tactiques de gestion de l'enchère, là je lui ai laissé la main car je suis tout à mes problématiques stratégiques de surveillance du mage. Le barde est surpris par mon comportement, mais c'est parce qu'il ne sait pas.

Pendant ce temps, même si je ne m'intéresse désormais que distraitement aux enchères, c’est un duel à la vie à la mort entre Jana Vise-l’œil et notre ménestrel. On pense que je surjoue le contexte pour le bien de la narration et que ce n'est qu'une simple métaphore. Mais vu le climat de haine et de tension entre eux, cela risque bien de se conclure par l'un des deux gisant mort sur le plancher de cette trirème. Cette fin semble aussi inéluctable que les trois coups de marteau formalisant l'adjudication d'un lot.

Les prix montent, montent, montent, avec Jana qui, à chaque enchère, jette un regarde toujours plus haineux à notre ami Lugan, désormais le centre de l’attention de toute la salle. Enfin de toute la salle, pas tout à fait. Je sais et je surveille Valentin. Et soudain retentissent les trois coups. L’enchère vient de se terminer. Avec 220 pièces d'or, le barde vient de gagner la vente et remporter la lutte qui l’opposait à la rombière. Elle a le regard plus mauvais que jamais. La tension est à couper au couteau, et je ne sais qui entre Jana et Valentin va dégainer le premier, mais je le sens, le drame est imminent.

Et là résonnent les trompettes de l'apocalypse, mais pas tout à fait comme mon brillant cerveau l'avait conceptualisé. Car d’un coup, un tonneau de feu grégeois jaillit du plafond et explose en plein milieu de la pièce. Le feu s’étend rapidement, et visiblement Valentin Pauvre-Mage est aussi terrifié que tout le monde. Soit il joue très bien la comédie, soit il va bien falloir se l’admettre, même les génies font des erreurs. (note de jeu, l'erreur vient d'un échec critique sur le jet d’observation au début des enchères, Valentin ne préparait rien du tout). 

Pendant que je tergiverse, digérant ma méprise, Alceste lui était sur le qui-vive. Le commissaire priseur a laissé tomber la cassette qui contenait les œufs, et mon ami à la hache, n’écoutant que son courage, se jette pour les récupérer. Bondissant tel un léopard, ce qui est surprenant pour un homme ne quittant presque jamais son chien, il rattrape les œufs avec une infinie délicatesse et se retrouve de l’autre côté de la salle et du feu grégeois. Il a été brûlé dans la manœuvre. Mais visiblement, cela n’arrêtera pas un costaud de sa trempe.

Cela tombe bien car les deux gredins, dont il avait repéré les manigances avant tout le monde, se jettent à sa poursuite. Et le voilà désormais cerné. Il tente de faire sauter les murs de la salle à coups d'épaule et de se jeter à l’eau. Mais notre solide gaillard n'arrive pas à montrer à la vieille trirème de quel bois il se chauffe, et le mur reste bien en place. Il se retourne donc et fait face à l’adversité, son immense hache brandie. Le tout dans une ambiance d’enfer sur terre, ou plus précisément sur mer.

Pendant ce temps-là, Lugan et moi nous nous dirigeons vers le toit du navire pour secourir Alceste. En effet, il y a des échelles au quatre coins de la salle et c'est le seul chemin encore praticable pour le rejoindre, le centre de la salle où s'est produit l'impact étant désormais une fournaise intraversable. Le troubadour a de l’avance, car je dois l'admettre, j'étais quelque peu déconcentré au moment de l'explosion. Quand nous arrivons sur le toit, nous découvrons quatre vilains qui menacent de descendre chercher les œufs manu militari. Il faut sauver le soldat Alceste ! N’écoutant que notre courage, nous nous jetons sur les faquins, en hurlant pour détourner leur attention.

Pendant ce temps, Alceste s’en sort mieux que bien. En un coup de hache, un premier brigand a été découpé en parts égales, le colosse a décidément le compas dans l'œil. Le second brigand continue le combat, mais sa vaillance diminue à chaque coup que lui porte notre compagnon.

Sur le toit, le combat fait rage. Avec un premier coup d’épée, Lugan a embroché l'un de nos adversaires. Et j'ai entaillé sérieusement l’un des trois restants. Le combat continue encore une dizaine de secondes, et voici la tête d’un deuxième maraud qui roule, délicatement tranchée par le ménestrel, aussi à l'aise à l'épée qu'à la lyre. La tête dégringole l'échelle et arrive au pied d’Alceste et de son opposant. Je blesse à nouveau mon adversaire et je me permets de fanfaronner en m’époumonant d’un : « et à la fin de l’envoi, je touche ». Les trois derniers lascars (un en bas blessé, deux en haut dont un grièvement blessé) prennent leur jambe à leur coup face à tant de violence et se jettent à l’eau, sans demander leur reste. J'aime à croire que mon mot d'esprit y était pour beaucoup.

Sur cette belle victoire, nous rejoignons prestement le quai, car le feu continue de se propager et la trirème va bientôt n’être qu’une carcasse fumante. Là démarrent quelques minutes d’incompréhension avec les gros bras, car on croit que nous avons volé les œufs. Le calme revient progressivement quand on comprend que nous avons sauvé la vente et le premier prix. On panse les blessés. On traque les assaillants que d’ailleurs on ne retrouve pas, et on en déduit qu’ils se sont probablement noyés. Cerfa le commissaire-priseur revient à ses affaires, et procède à la remise des prix moyennant paiement. 

Enfin, concernant notre lot, il s’agit plutôt d’un échange entre notre chèque au porteur et 80 pièces d’or, puisque Alceste a toujours sur lui la cassette qui contenaient les œufs. D'ailleurs, quand on ouvre le coffret, ils sont tous les trois intacts et nous sommes rassurés. Raimbaud et Edelsterand viennent chaleureusement nous féliciter, et on se confirme qu'il faut vite se revoir autour d'une boisson fortifiante.

La journée se termine magnifiquement pour mes compagnons et moi. Nous avons accompli notre mission et sommes désormais lestés de moult pièces d'or, qu'il va certes falloir se partager, mais c'est une somme plus que conséquente par rapport à ces derniers mois. Nous sommes les héros du jour, même si notre notoriété va probablement être éphémère. Et surtout, mon ami Raimbaud devrait pouvoir nous ouvrir en grand les portes de la haute société. A ma noble personne tout du moins, car mes compagnons restent des roturiers. En tout cas, je commence à me sentir chez moi à Laelith. Est-cela l'exil, quand on arrête de fuir et qu'on se découvre une nouvelle patrie ? Avec à la clé je l’espère un statut de gentilhomme, voire un titre de noblesse ?

Soudain, un doute m'étreint et je demande à revoir les œufs. La raison que j'avance a mes camarades est que je veux contempler à nouveau le trophée du jour, ce qui paraît fort crédible. Mais en vérité, je suis fort troublé. Je fouille et refouille dans les tréfonds de ma mémoire, de mon palais mental devrais-je dire d'ailleurs, tant je me souviens toujours de tout. Je me remémore très bien ce grimoire de zoologie draconique. Trois pleines pages sur leurs œufs, avec gravures détaillées et moult précisions. Et ce qu'il y a en face de moi dans cette cassette, ce n'est pas la progéniture d'un griffon, mais bien celle d'un dragon.

Si les premiers sont de nobles destriers aériens mi-aigle mi-lion, les seconds sont d'immenses monstres volants, terreur des cieux. Que font des œufs de ce type dans une vente aux enchères des Pontons? Comment ont-ils pu être confondus avec ceux d'un griffon, ou alors ont-ils été sciemment présentés comme tels ? Mon cerveau est en surchauffe. En comparaison, la fournaise de tout à l'heure était un simple feu de camp. Je crains que nous nous soyons mis dans une situation plus que périlleuse, avec des adversaires visiblement aussi retors et puissants que mystérieux. Dans cette situation d'une complexité insondable, je me raccroche à l'idée que Raimbaud pourrait être la solution à tous nos problèmes, avec un copieux bénéfice à la clé si je joue bien ma partition. Enfin, je voulais dire, notre partition.

Pendant que je cogite devant la cassette, Alceste me donne un coup de coude et me sort de ma méditation. Il semblerait que les deux prêtres veuillent nous parler, et ils sont accompagnés d'un personnage de noble stature que je ne reconnais pas. Visiblement, les ennuis ne font que commencer...
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Cuchurv
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Cuchurv »

Botot a écrit : jeu. sept. 26, 2024 10:43 pm Merci à tous pour vos retours qui donnent envie de partager. Il se trouve que j'ai encore quelques épisodes sous le coude, comme le sait d'ailleurs le troubadour à qui je réponds ici, face au clash qu'il propose. Réponse A, B ou C
* A: dois-je t'apprendre le principe de la licence poétique, cher ami des arts lyriques ?
* B: mais oui viens poster ta life, on va voir qui pèse dans le game 
* C: si tu avais répondu le jour même quand je t'ai posé la question, alors que tu bronzais négligemment en Sicile, peut-être n'aurais du pas user de ce ressort narratif, qui s'est in fine révélé merveilleusement adéquat et qui a conduit ma joyeuse ignorance de tes réponses ultérieures.

La réponse D). :mrgreen:

Mais puisque tu me provoques, OK je vais faire de mon côté ma version des choses. ;)
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Botot »

Acte 1, scène 3: une soirée endiablée
  
 Nous nous approchons des deux prêtres et de ce mystérieux personnage. L'homme inconnu se présente, il s'appelle Bernys et a la difficile tâche d'administrer ce quartier. A l'évocation de son nom, je comprends bien qui il est et comment il en est « venu » à ses lourdes responsabilités. Il nous explique qu'on l'a alerté d'une crise sur la trirème des enchères et nous remercie plus que chaleureusement pour notre intervention.
  
 Le vieux clerc prend la parole, il semble quelque peu gêné. Il nous explique que malgré notre valeureuse intervention durant la vente, il reste le sujet des taxes. Il reste assez évasif puis commence à parler d'un taux du cinquième. Je calcule rapidement, on parle de 44 pièces d'or soit plus de la moitié de notre gain putatif ! Nous tentons de faire valoir nos mérites pour diminuer la dîme sur la transaction, mais même après un geste on parle de toujours de plus de trente pièces d'or. Certes nous avons sauvé la vente aux enchères, mais "dura lex, sed lex". Ce que nous comprenons tous, sauf Alceste bien sûr, mais cela n'a pas l'air de le déranger le moins du monde.
  
 Nous semblons tous embarrassés par la tournure que prend la conversation. Après quelques instants de silence, le jeune prêtre aux muscles saillants intervient. Il aurait une proposition à faire, qui permettrait à chaque partie de s'y retrouver, tout en respectant la loi. Bernys approuve fortement, sur son territoire tout le monde doit y trouver son compte. Nous avons certes aidé la cité ce soir, mais si nous faisions un peu plus, on devrait pouvoir trouver une exemption dans le code fiscal, pour service rendu. Mais tout d'abord, il faudrait les informer du nom de notre commanditaire, en tout anonymat cela va de soi.
  
 Je me permets de parler de Maître Marckmell, ce qui n'engage qu'à peu de choses finalement. Tout d'abord nous avons probablement été vu à son office, donc il remontera cette piste quoiqu'il arrive. Et de toute façon, le notaire n'est probablement qu'un prête-nom pour un personnage très puissant. Cela semble détendre fortement la négociation. D'ailleurs, le jeune enfroqué du crâne reprend. Si en sus de cette information, qui lui gagnera un temps certain et pour laquelle il nous remercie, nous pourrions être exemptés de toute taxation en lui dénichant le nom de celui qui a fourni les œufs au commissaire priseur. Pour cela, rien de plus simple, enfin c'est comme ça qu'il nous le présente. Il suffirait de prendre Serhafa en filature et de remonter au commanditaire.
  
 Connaissant la juste valeur des choses, et sachant que nous avons sur nous plus que de simples œufs de griffon, j'embrasse la proposition en mon nom et celui de mes compagnons. Et nous arrivons à un accord. Nous gardons les 80 pièces d'or, mais il va falloir surveiller Cerfa. Nous nous séparons bon amis, enfin c'est manière de dire puisque reste cette transaction sensible à laquelle nous nous sommes résolument engagés.
  
 Profitant enfin d'un temps seuls ensemble, j'informe mes compagnons que les œufs sont probablement plus qu'ils ne le semblent, mais je garde pour moi les détails de leur géniteur. Je fais remarquer que Raimbaud pourrait nous aider à naviguer cette situation complexe. Lugan est circonspect, il m'explique que l'aristocrate est certes introduit auprès du Roi-Dieu, mais qu'il pourrait n'être qu'un jouet sans influence, et il veut être persuadé par le nobliau. Même si à titre personnel je suis plus que convaincu, j'accepte d’être prudent avant de tout dévoiler.
  
 Nous convenons donc d'aller voir les deux aristocrates en goguette, pendant qu'Alceste essaiera de suivre Cerfa. Quand nous arrivons auprès des deux gentilshommes, nous voyons Raimbaud tentant d'expliquer à ses domestiques qu'il faut charger le secrétaire délicatement sur la barque, car c'est un objet précieux, alors que visiblement les serviteurs y vont en force.
  
 Nous l'abordons, nous compatissons sur la difficulté à trouver du petit personnel de qualité et nous lui proposons un verre rapide pour l'entretenir d'un sujet d'importance. Il y consent avec un plaisir évident, et nous lui expliquons que ces œufs de griffon pourraient avoir des implications significatives. Il n'est pas très clair sur le sujet, ce qui fait douter le barde. Le nobliau termine, en proposant de s'entretenir précisément de tout cela chez lui un peu plus tard, en toute discrétion. Mon ami Raimbaud est la voie de la sagesse, nous devons définitivement continuer avec lui !
  
 Par contre, quelques peu gênés, nous lui expliquons que fraîchement arrivé nous n'avons pas encore nos entrées dans les hauts quartiers. Qu'à cela ne tienne! Il tient à nous revoir et à nous aider dans notre délicate affaire. Il nous tend une carte signée de sa main, qu'on pourra présenter à la fort recommandable Auberge des Trois Paons. Et de-là, en nous prévalant de son nom, nous pourrons le rejoindre dans les quartiers nobles pour lui dire tout. Nous nous quittons une nouvelle fois en excellent terme, et nous nous rapprochons des hauteurs, celles symboliques de l'aristocratie mais aussi celles physiques de la ville. En effet, Laelith est composée de six quartiers appelés terrasses en raison du dénivelé de la cité. Et au sommet se trouve la haute terrasse, la sixième et la plus haute, qui abrite le palais du Roi-Dieu et les hôtels particuliers des nombreux membres de sa cour.
  
 Pendant ce temps, Alceste surveille Serhafa (ou Cerfa pour les intimes). Pris par un éclair de génie, il fait renifler à son chien l'odeur du commissaire priseur. Il le fait malheureusement avec assez peu de discrétion. Mais vu le chaos ambiant, notre nouveau statut de sauveurs et l'absence évidente de subtilité de notre compagnon, quand le chien s'approche en le reniflant, Cerfa s'énerve mais passe très vite à autre chose. Il est tellement stressé qu'il ne comprend pas ce qui se passe, il veut juste quitter les Pontons. Mission accomplie pour Argos, le molosse du colosse.
  
 Nous nous retrouvons tous les trois. Cerfa vient de quitter les lieux sur sa propre barque en direction de l'autre rive, accompagné de ses gardes du corps. Il se dirige vers la Chaussée-du-lac, l'une des six terrasses de Laelith, celle qui abrite le port mais également nombre d'auberges plus ou moins malfamés. Les deux prêtres nous ont prodigué une embarcation, et nous le suivons dans la nuit noire et obscure, illuminée uniquement par les lanternes des quelques navires qui parcourent le lac. Jusqu'ici la filature se passe à merveille. Et nous accostons quelques dizaines de secondes seulement après la barque du commissaire-priseur. Et la chasse commence. Alceste est devant nous avec son chien. Et nous le suivons trente pieds derrière.
  
 Au départ, tout se passe bien. Profitant des capacités olfactives d'Argos, Alceste reste suffisamment à distance pour traquer sa proie sans être vu. Nous avançons dans Laelith et soudain, tout s'accélère. Visiblement Alceste a été repéré et il doit courir pour maintenir la cadence et ne pas se laisser distancer. Une course effrénée est désormais en cours mais nous n'arrivons pas à rattraper Serhafa et ses sbires. Heureusement nous arrivons à garder leur trace malgré le caractère labyrinthique des ruelles de la Chaussée-du-lac, un exploit pour les non-initiés que nous sommes. (note de jeu : excellent jet d'observation, sinon nous serions complètement perdus) Après quelques intenses minutes, nous arrivons devant une ruelle miteuse, et au bout se trouve un escalier qui descend visiblement vers le Cloaque. Malgré notre fatigue, nous n'écoutons que notre courage et continuons la poursuite.
  
 Il semble que nous ayons surestimé nos aptitudes, car dans les dédales sous la ville nous n'en menons pas large. Mes compagnons s'inquiètent à chaque carrefour de faire une mauvaise rencontre mais à titre personnel, c'est le bruit et l'odeur qui me dérangent le plus, on ne se refait pas. Nous avançons comme nous pouvons dans les souterrains sinueux des bas-fonds, mais nous sentons que nous perdons progressivement la trace de notre proie. Et tout d'un coup, Lugan nous avertit. Il a tendu son oreille, organe exercé à décrypter toutes les mélodies mais qui avec les années est devenu également instrument d'exception pour détecter tout type de son, même les plus étranges. Il a compris que nous allions être attaqués par une avant-garde de gobelins et qu'ils allaient tenter de nous rabattre vers le gros de la troupe (note de jeu, réussite critique sur le jet d’observation, jamais nous n'aurions dû en savoir autant).
  
 Fort de cette information, nous décidons de passer de gibier à proie, et nous prenons l'ennemi à revers. S'ensuit un combat où nous prenons difficilement le dessus, avec en particulier Alceste qui dans des lieux aussi étriqués manie son énorme hache avec difficulté. Mais au final, cinq gobelins gisent au sol. Un dernier gobelin arrive cependant à s'enfuir et nous craignons qu'il donne l'alerte. Malgré tout, nous sommes saufs. Nous avons fini par dominer nos adversaires, mais nous sentons que le combat était beaucoup moins fluide que le précédent : il est passé minuit et nous avons déjà beaucoup donné dans le combat sur la trirème ! (note de jeu, si sur le premier combat les dés avaient été avec nous, lors du second beaucoup moins)
  
 Nous décidons de rebrousser chemin et de sortir du Cloaque, car nous sommes complètement fourbus. Bonne nouvelle, les œufs sont intacts malgré la dureté du combat. A la sortie des sous-sols, nous discutons de la prochaine étape. Alceste veut aller directement à l'Auberge des Trois Paons, malgré l'heure tardive et nos habits couverts de boyaux de gobelins. Et il faut toute la force de conviction conjuguée du barde et de votre serviteur pour lui expliquer que, malgré ma noble origine et notre amitié avec Raimbaud, nous serions refoulés de ce noble établissement où l'allure sera reine (note de jeu, et tout cela malgré Alceste qui surjouait son personnage et le vil MJ qui nous y poussaient).
  
 Nous partons à la recherche d'une taverne moins prestigieuse pour la nuit, et nous tombons sur le Comptoir de l'Aventure. A peine entrés, nous faisons sensation. Tout de même, qui débarque passé les douze coups de minuit couverts des entrailles de ses adversaires ? L'aubergiste, flairant le bon coup, s'empresse de nous accueillir. Le comptoir doit son nom à tous les baroudeurs passés en ces lieux, et définitivement nous adhérons au style de la maison. Le tenancier nous prodigue à la fois nourriture, baignoire et chambre individuelle, le tout pour un prix réellement modique. Notre réputation est en marche, et il veut en être.
  
 Nous profitons de toutes ces délicates attentions puis finissons par nous écrouler dans nos lits, épuisés par cette trop longue journée, mais satisfaits de nos exploits. Pour être précis, tout le monde ne tombe pas immédiatement dans les bras de Morphée. En effet, Alceste a accepté de prendre le premier tour de garde. Nous devons rester prudents, tant pour surveiller les œufs qu'éviter un mauvais tour de Jana Vise-l'oeil. Merci Lugan, nous sommes dans de beaux draps, au sens propre comme figuré.
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Botot »

Acte 1, scène 4 : un concert du tonnerre

La nuit se passe bien, et nous nous réveillons bien après les premiers rayons du soleil, frais et dispos, même si nous restons mentalement éprouvés par la longue journée de la veille (note de jeu, nous avons consommé l'essentiel de nos points d'équilibre psychique, il faudra deux semaines de repos pour les retrouver, et cela limite fortement notre puissance).

Démarre le petit-déjeuner, et je tente d'impressionner l'aubergiste par ma noblesse, pour avoir des pâtisseries qui siéent à mon rang, on a du style ou on ne l'a pas. Et une nouvelle fois, je sens que mon prestige n'a pas fait mouche. Certes, je me fais servir des pâtisseries admissibles, mais très clairement ma noble personne n'a pas été très percutante, c'est très gênant. (note de jeu. Burak échoue de manière assez systématique à ses jets de relation sociale, malgré de belles caractéristiques)

Pendant ce temps, notre ami le troubadour prend sa lyre, visiblement c'est une habitude dès qu'il se trouve dans une taverne. Cela commence comme un accordement d'instrument. Mais d'un coup, quelque chose d'étrange se produit. Notre barde semble pris d'une transe, sa voix et son instrument ne font plus qu'un, et toute la salle est comme envoûtée par son incroyable talent. Le public de l'auberge entre en communion avec la musique de notre troubadour, et reprend en chœur ses refrains. Ce concert improvisé attire le public de La-chaussée-du-Lac et les rues autour du Comptoir de l'Aventure entrent en effervescence.

C'est cet instant que choisit une jeune femme pour s'asseoir devant Alceste et moi. Elle nous dit s’appeler Sorgeuse et venir du "milieu". Mais nous pouvons l'appeler Musaraigne. Comme ce petit mammifère au nez pointu et à l'excellent odorat, elle sait aussi bien se faire discrète que traquer une proie. J'aurai pu l'ignorer, mais je suis vexé voire jaloux de toute l'attention portée à notre barde, et je la vois comme une occasion de faire mon intéressant. Et puis plus objectivement, nous sommes dans une situation plus que compliquée et elle semble avoir du ressort. Bref, nous discutons. (note de jeu : il s'agit également d'un nouveau PJ que nous nous devons d'accueillir comme il se doit)

Elle nous explique avoir été mandatée par des hautes sphères "non orthodoxes " pour investiguer ce qu'il y a derrière les incidents qui se multiplient à Laelith, car cela nuit aux affaires dans la cité. En particulier, il y a cette pièce de théâtre, Orbis Tertius. Sa première avait lieu hier soir au grand théâtre de Laelith, sur la terrasse de la prospérité. Et elle a été interrompue violemment au début du deuxième acte, après l'assassinat d'un des acteurs. De manière presque concomitante à l'attaque à baril armé de la trirème des enchères. Cette « coïncidence », ainsi que quelques autres incidents de moindre importance, a généré une sourde inquiétude qui commence à gangrener la ville. 

Mais cela résonne particulièrement en moi car je connais bien cette pièce. Je vous en avais parlé au début de mes mémoires, c'est la source de mon exil. C'est un drame en cinq actes dont la première a eu lieu chez moi en Caphernabad. Elle a été interrompue après quelques scènes par les janissaires du calife. Et acteurs comme spectateurs ont été massacrés. Dans les heures qui avaient suivi, la fine fleur de la noblesse locale dont ma famille avait disparue, au cachot ou de manière plus expéditive.

Mais ce n'est pas tout. Lors de mon trajet d'exil entre le califat et Laelith, je suis passé par Rhadjaban, dite aussi la Cité du Soleil, ville-état indépendante. Et à cette occasion, j'ai assisté à la seconde représentation de ce drame maudit, forcément curieux de ce qui avait déclenché mon expatriation. Et une nouvelle fois, cela a fini par un bain de sang, déclenché une fois encore par des agents du calife en mission au-delà des frontières du Sultanat. Cette pièce me poursuit donc, même si je ne sais ni comment ni pourquoi.

J'en profite pour vous faire une confidence. Lors de ma première existence, juste avant tous ces funestes événements qui m'ont jeté en exil, j'avais commencé à m'entraîner avec une compagnie de théâtre, de passage dans le califat. En toute discrétion cela va de soit, car je voulais être prêt avant de me révéler. Mais là je pense que je suis prêt. Si une prochaine de Orbis Tertius avait lieu, je voudrais être sur scène, tant pour défier le destin que pour assouvir mon envie irrépressible d'être dans la lumière.

Mais revenons à Musaraigne. Elle pourrait nous aider par ses talents, surtout dans ce contexte extrêmement tendu. De plus, ce qui la crédibilise, c'est le récit qu'elle nous fait de son début de journée. Elle nous a pisté jusqu'à l'étude de maître Marckmell, avec qui elle a commencé un interrogatoire poli. Alors qu'elle avait démarré son échange avec lui, elle a été sortie du bureau par un prêtre du crâne extrêmement musclé. Après un entretien rapide, le curé est reparti et quand elle est revenue discuter avec le notaire, il était devenu l'ombre de lui-même et elle n'a rien pu tirer. Bien sûr, je devine de qui il s'agit. Comme prévu, l'enfroqué du crâne a retrouvé sans traîner notre commanditaire. Je me félicite d'avoir le curé comme allié, surtout vu l'état dans lequel il a laissé maître Marckmell.

Au-delà d'avoir retrouvé notre piste avec une extrême célérité, je sens que Sorgeuse est une experte dans ce que certains appelleraient l'art du roublard. De plus, elle a joué cartes sur table et j'apprécie. Je lui propose de rejoindre notre compagnie le temps de résoudre la situation, dans un arrangement mutuellement profitable, et évidemment cela contribuera à me remettre en maîtrise des événements. En guise de couverture, je lui soumets l'idée de devenir mon valet, ce qu'elle accepte prestement. Et nous continuons à deviser. Alceste est là depuis le départ, mais ses interventions dans la discussion continuent à se limiter à quelques grognements à intervalles réguliers.

Soudain, nous nous rendons compte que Lugan ne fait pas qu'animer un concert devant le Comptoir de l'Aventure. On ne saura pas si c'est le génie du barde, le destin, une aide divine ou plus simplement le hasard, mais la nouvelle de sa performance s'est visiblement répandue dans tous les quartiers de Laelith, et il est désormais la star des bas quartiers (note de jeu, réussite critique du jet de chant du barde, mais d'une magnitude tellement incroyable que notre MJ d'ordinaire si cruel a dû inventer quelque chose). On ne l'arrête plus et son nouveau public l'acclame. C'est désormais l'ensemble de la ville qui semble pris d'extase. 

Est-ce par ce que le peuple de Laelith était inquiet de tout ces sordides événements récents, ou par un besoin plus diffus de se détendre face à la dureté du quotidien, mais en tout cas il vit une parenthèse enchantée, transcendé par le talent du ménestrel. L'ensemble de la vill semble en rythme et rime avec la lyre du ménestrel. Et la moitié de la cité est dans la rue dans ce qui semble une immense fête de quartier improvisée.

A ce moment, nous voyons arriver Raimbaud. Il a entendu qu'il se passait quelque chose d'incroyable dans les bas-quartiers et il a voulu voir ça de plus près. Et il découvre que nous, ses amis, sommes au cœur de tout ça. Il propose de nous accompagner jusqu'au palais du Roi-Dieu, où nos exploits viennent de retentir. Nous le remercions pour son invitation, mais il insiste pour nous remercier de cette opportunité pour laquelle nous seront son obligé. Nous convenons que nous sommes quittes et le suivons (note de jeu, bien sûr qu'il nous doit tout, grâce à nous il va devenir un personnage important de la cour, mais tout ça nous ne le savons pas). 

La foule nous suit, toujours plus fervente, dans notre montée vers les hauts-quartiers. Quand nous arrivons aux portes de la ville-haute, nous les franchissons et laissons derrière nous la foule qui crie le nom de Lugan. Nous voici en route vers notre destinée, auréolés de notre célébrité, enfin surtout de celle du barde, même si ça me fait du mal de le préciser.
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Cléanthe »

Salutations, je n’ai pas encore lu le CR, mais en préambule j’ai une question : le mj de cette partie utilise t’il la version Sang-dragon de Simulacres ou une autre mouture, si oui laquelle svp ? Merci. 🙏
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Cuchurv »

Cléanthe a écrit : jeu. oct. 31, 2024 5:44 pm Salutations, je n’ai pas encore lu le CR, mais en préambule j’ai une question : le mj de cette partie utilise t’il la version Sang-dragon de Simulacres ou une autre mouture, si oui laquelle svp ? Merci. 🙏

On est sur la version Sang Dragon il me semble. 8)
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Cléanthe »

Cuchurv a écrit : ven. nov. 01, 2024 10:30 am
Cléanthe a écrit : jeu. oct. 31, 2024 5:44 pm Salutations, je n’ai pas encore lu le CR, mais en préambule j’ai une question : le mj de cette partie utilise t’il la version Sang-dragon de Simulacres ou une autre mouture, si oui laquelle svp ? Merci. 🙏

On est sur la version Sang Dragon il me semble. 8)

Super, c’est celle que j’ai ressorti en relisant en parallèle mon vieux hs sur Laelith. Ça donne envie ce récit.

Les Pontons, c’est dans quel secteur de Laelith ? Je n’ai pas retrouvé le lieu dans mon HS ?
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Cuchurv »

Les pontons sont décrits dans le sourcebook sur Laelith édité par Black Book éditions il y a quelques années.
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Re: [CR] On a marché sur des oeufs - LAELITH - SIMULACRES

Message par Cléanthe »

Merci. Quel récit en tout cas passionnant et cocasse grâce aux nombreux échecs critiques !
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